La Politique est le produit le plus ignoble et le plus néfaste de l'existence des sociétés humaines. Elle séduit inévitablement les esprits à des spéculations dont la matière est la liberté, la vie, les biens des individus considérés en masse, et qui supposent toujours leur passivité et leur docilité obtenues soit par la crainte, soit par la faiblesse d'esprit ; et ceci, quels que soient le système ou le régime qui soient en vigueur, les intentions des politiquants, leur valeur ou leur vertu. C'est une triste nécessité. Toute politique est une volonté de rendre une population conforme à un modèle créé par l'esprit, et de mener les affaires de cette masse comme une affaire d'un seul - ce qui se fait en nommant ce Seul : Nation, Etat, peuple - etc. et en lui attribuant une sorte de sensibilité, de susceptibilité, des appétits, des motifs d'orgueil, de peine, de joie etc., des souvenirs, des regrets et des espoirs - qu'on essaye d'inculquer à tous. Si chacun se croit propriétaire d'un territoire - dont la plupart ne possèdent même pas un mètre carré, chacun est ainsi sensibilisé à l'égard des accroissements ou diminutions de ce territoire et prêt à se battre furieusement pour ou contre ces modifications desquelles cependant il n'a généralement rien à espérer.